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Loi du 26 juillet 1843 sur l’instruction primaire: enseigner en allemand et en français
1843
Tags de l'article : réforme
L’enseignement public moderne est organisé par une première loi scolaire et placé sous le contrôle de l’État aussi bien que de l’Église.
Après avoir été annoncée dans la constitution de 1841, la loi scolaire du 26 juillet 1843 vise une réforme profonde de l’enseignement primaire et s’intègre dans un processus de formation d’institutions centralisées qui devaient accélérer la formation d’un État autonome. En s’inspirant des lois semblables en France, Belgique et aux Pays-Bas, et basée sur des règlements précédents, la loi cible une amélioration de l’instruction primaire. Chaque commune est tenue d’entretenir une école de manière continue. À l’époque, selon Albert Calmes, un tiers des communes ne possédaient pas d’école primaire et des 382 écoles existantes, 176 ne fonctionnaient que durant les mois d’hiver.1Albert Calmes, Histoire contemporaine du Grand-Duché de Luxembourg. Volume IV: La création d’un Etat 1841-1847, Luxembourg 1983, p. 266. La loi fixe un parcours de six années d’école qui ne sont toutefois pas obligatoires.
La nouvelle loi introduit l’enseignement en allemand et en français ce qui constitue une étape importante vers la formation d’un état multilingue dans un contexte de démembrement de la partie majoritairement francophone du pays en 1839. (art. 1) L’introduction du français comme branche à étudier en écrit et en lecture ne se déroule pas sans contestation : Afin de combler des lacunes linguistiques en français de certains instituteurs et de faire face aux critiques des parents, une dispense d’enseigner en français peut être attribuée.
La loi règle en outre l’influence de l’Église dans l’école primaire. Bien que l’État soit l’autorité principale dans le pays, l’Église catholique possède un droit de consultation. Ce compromis en faveur de l’Église est le produit de longues discussions polémiques entre, d’un côté, le vicaire apostolique Jean-Théodore Laurent et ses supporters et de l’autre côté, des membres du gouvernement libéral. Le cours de religion est assuré par le curé de la paroisse et en tant que membre de la commission scolaire communale, il a à tout moment accès à l’école. (art. 51, 57) Les instituteurs cependant restent les seuls dirigeants des autres leçons. (art. 53)
Afin d’améliorer la qualité d’enseignement, une école normale pour former les nouveaux candidats est créée. (art. 87) En effet, la loi permet d’être instituteur à l’âge de 18 ans et sous-maître à partir de 16 ans. (art.2) Le clergé veille à la formation religieuse de ces instituteurs. (art. 87) Tout candidat doit préalablement fournir un certificat de moralité civile et religieuse délivré par le bourgmestre, et l’échevin de la commune ainsi que du curé de la paroisse. (art. 75) Une commission d’instruction royale grand-ducale est composée d’un tiers de membres du clergé qui a notamment le droit d’évaluer les manuels scolaires et qui contrôle les instituteurs. (art. 59, 61, 73) L’organisation de l’instruction primaire est ainsi centralisée et le corps d’instituteurs fortement hiérarchisé : Ainsi les instituteurs sont divisés de façon hiérarchique en classes et doivent acquérir des brevets de compétences à travers des formations continues. (art. 83)
La loi connait en outre une nette différence entre écoles publiques et écoles privées. Bien que les écoles privées ne puissent pas être subventionnées par l’État, ils sont soumis aux mêmes contrôles et conditions que leurs pendants publics.
Si dans tous nos rapports précédents et particulièrement encore dans celui de l’année dernière, nous avons particulièrement signalé l’enseignement du français, comme laissant beaucoup à désirer, surtout dans un très-grand nombre d’écoles des cantons des Ardennes, nous avons pour le constater, devant nous le résultat du concours qui a eu lieu au mois d’août dernier entre plusieurs écoles des cantons de Clervaux et de Wiltz. Voici comment s’exprime à cet égard le Président du concours dans un rapport du 30 du même mois : « La lecture française est généralement négligée. Il parait que, sauf quelques rares et honorables exceptions, les instituteurs ne donnent aucun soi à cette branche de l’enseignement ; j’ai même pu constater que, dans certaines écoles, on n’a commencé à lire le français, qu’au moment où ces écoles ont été désignées pour le concours. » Mais répétons-le, le plus grand nombre des écoles sont en voie de progrès. (sic !) 2Cité d’après le Rapport général sur l’état de l’instruction primaire dans le Grand-Duché de Luxembourg, pendant l’année scolaire 1854 à 1855, fait en exécution de l’art. 81 de la loi du 26 juillet 1843, sur l’instruction primaire, dans : Der Schulbote. Eine Zeitschrift zunächst für die Schullehrer des Großherzogthums Luxemburg bestimmt, n° 12 (1855), p. 298-299.

Documents
Notice biographique de Johannes Theodor Laurent (*1804-†1884)
Johannes Theodor Laurent (né le 6 juillet 1804 à Aix-la-Chapelle, mort le 20 février 1884 à Simpelveld) fait des études en théologie à Bonn et Liège, où il entre au séminaire. Après sa consécration épiscopale en 1839, Laurent devient vicaire apostolique d’Allemagne du Nord et évêque titulaire de Chersonèse en Crète. En décembre 1841, il est nommé vicaire apostolique du Luxembourg. Par sa personnalité, répandu d’énergique et …. , son soutien absolu de Rome et ses exigences maximales au profit de l’Église catholique, Laurent entre vite en conflit avec le gouvernement libéral du pays. Ces conflits tournent notamment autour de l’influence de l’Église dans l’école publique. À la suite des courants révolutionnaires de 1848, le gouvernement luxembourgeois exige son rappel auprès du pape Pie IX. D’après Georges Hellinghausen, les affaires scolaires auxquelles étaient liées Laurent, furent une des causes de sa chute.3Hellinghausen Georges, Rome–La Haye–Luxembourg et la question scolaire au Grand-Duché, dans: Hémecht 2016/2, pp. 141-187, ici : p. 178.
